L'épuisement matérialiste de la philosophie des passions dans le gouvernement des positions : la philosophie d'Helvétius - Institut de Recherche sur l'Education : Sociologie et Economie de l'Education Accéder directement au contenu
Chapitre D'ouvrage Année : 2012

L'épuisement matérialiste de la philosophie des passions dans le gouvernement des positions : la philosophie d'Helvétius

Résumé

On dit assez qu'Helvétius est l'auteur d'une philosophie affirmant que « l'homme est le produit de son éducation ». Cependant le sens ici du terme « éducation » n'est pas toujours clair et surtout, les enjeux philosophiques d'un tel système n'apparaissent pas nettement. L'objet d'Helvétius n'est en effet pas de lier cette doctrine à la revendication d'une éducation populaire, par exemple ; ce seront les Idéologues qui s'appuieront en partie sur la philosophie helvétienne pour étayer une philosophie politique progressiste de cet ordre. En homme des Lumières françaises, Helvétius se préoccupe plutôt d'enjeux anthropologiques. Il s'agit pour lui d'interroger la spécificité de l'humanité, la consistance de l'individu et la possibilité de son émancipation vers plus de bonheur. En outre, il représente au sein des Lumières une des voies « matérialistes » dans cette réflexion. Or précisément, le système construit par Helvétius pour répondre par « l'éducation » à ces questions anthropologiques consiste en une vaste théorie des passions qui devient ainsi le coeur de la science de l'homme. Nous nous proposons donc ici d'examiner dans un premier temps comment Helvétius propose de répondre à la question de la spécificité de l'humanité par un traité des passions, qu'on peut appeler « matérialiste » car il défend l'idée que toutes les passions humaines sont « physiques ». Toutes les passions sont concernées, y compris celles qui sont désirs d'objets échappant apparemment à la sensibilité physique (la gloire, la recherche de la vérité scientifique) et celles qui semblent différer indéfiniment la jouissance physique (l'avarice, l'aspiration à la postérité), grâce aux distinctions que fait Helvétius entre passions naturelles et passions factices d'une part et entre plaisir de jouissance et plaisir de prévoyance d'autre part. Nous verrons ensuite comment le traité des passions helvétien est aussi la réponse à la question de la spécificité des individus, de l’identité personnelle. L’éducation, c’est-à-dire le processus donnant naissance aux passions, génère dans le même temps les identités personnelles. Or les passions sont elles-mêmes analysées comme des effets nécessaires d’un ensemble complexe de circonstances qu’Helvétius nomme une « position ». L’intérêt de ce système tient ainsi à son résultat paradoxal, sur lequel nous terminerons: la théorie des passions d’Helvétius est le cœur de l’anthropologie et de la philosophie de l’individu, alors que dans le même temps elle dissout explicitement aussi bien la consistance de l’individu distingué par ses passions (son identité personnelle) que la nature des passions elle-même dans l’analyse des circonstances qui leur donnent naissance.

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  • HAL Id : halshs-02077806 , version 1

Citer

Sophie Audidière. L'épuisement matérialiste de la philosophie des passions dans le gouvernement des positions : la philosophie d'Helvétius. Desjardins, Lucie; Dumouchel, Daniel. Penser les passions à l’âge classique, 2012, 9782705684044. ⟨halshs-02077806⟩
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