Le monument ou le tombeau du sens : les idées de monument et de trace dans le discours des dictionnaires, de Richelet à l'Encyclopédie - Université de Bourgogne Accéder directement au contenu
Article Dans Une Revue Elseneur Année : 2008

Le monument ou le tombeau du sens : les idées de monument et de trace dans le discours des dictionnaires, de Richelet à l'Encyclopédie

Résumé

Les problèmes qui relèvent de la relation (des relations) entre les notions de trace et de monument seront envisagés ici selon deux rapports particuliers. Le premier relève de leur participation à la question des signes. Tout d'abord parce qu'il sera question des signes que sont les mots « monuments » et « trace ». Ensuite parce que ces deux signes s'insèrent d'une manière particulière dans ce que l'on peut tenir pour une théorie du signe (une sémiotique 1). Sur ce plan, il convient de noter, sans que l'on puisse ici apporter les développements nécessaires, qu'une sémiotique, au sens moderne, n'est pas vraiment constituée pour la période que nous aurons à évoquer, où, pour aller vite, deux moments se suivent et se répondent. Un premier moment que l'on pourrait appeler cartésien (idéaliste), pour lequel nous renvoyons à la Logique de Port-Royal et aux travaux de Louis Marin 2 , précède un second moment, que l'on pourrait rapporter à Locke. Il s'agit alors de la formation sensualiste des signes et des idées, pour laquelle nous renvoyons au travail de Sylvain Auroux 3. Le deuxième axe de notre enquête, qui n'est pas sans rapport avec le premier, regarde la question de l'historiographie. La trace et le monument entretiennent deux relations spécifiques avec l'événementialité. Ces deux relations sont antagonistes : là où la trace est une invitation à suivre une piste (Achille pistant les traces confuses laissées par Ajax) et à construire un parcours indiciel, le monument implique une stase, une clôture, quelque chose qui ne se met pas en série (ni en récit, ni en histoire). La trace est devenir, le monument tend à figer la présence (d'où sa constante relation avec l'idée d'éternité). Notre propos partira d'un point de vue modeste, et délibérément prospectif. Il en va de la possibilité d'envisager ce qu'il en est de la notion de monument dans des ouvrages qui se donnent eux-mêmes comme monumentaux (par leur caractère de témoignage et leur évidente pesanteur). Cousin, cité par le TLF, comprend l'Encyclopédie comme un monument, au sens de « Témoignage écrit qui atteste des événements ou des choses du passé » : « l'Encyclopédie est le monument qui représente le mieux le dix-huitième siècle parmi nous, avec toute sa grandeur et sa hardiesse, et aussi avec tous ses dérèglements. COUSIN, Hist. philos. XVIII e s., t.1, 1829, p. 38 4. » Ce que nous proposons relève d'une archéologie (c'est bien le moins que nous puissions faire lorsqu'il s'agit de traces et de monuments), ou bien d'une généalogie, de la structure des idées classiques de trace et de monument, dans la mesure où ces idées nous renseignent sur les catégories reçues aussi bien que sur les déplacements et les redistributions opérées par les tendances et les forces qui parcourent les XVII e et XVIII e siècles. Il peut s'agir de sentir les tensions qui rendent ces notions à la fois riches et instables. Cette « méthode », nous l'avons construite artisanalement pour un autre objet, 1 Terme que l'on trouve déjà chez Locke et Pluche, voir Sylvain Auroux, La Sémiotique des encyclopédistes ; Paris, Payot, 1979. 2 Louis Marin, La Critique du discours. Sur la Logique de Port-Royal et les pensées de Pascal, Paris, Minuit, 1975. Cette note nous permet aussi de signaler la dette importante que nous avons envers « Le tombeau du sujet en peinture », conférence prononcée au colloque « Images de la mort, mort de l'image » (Tours, Université François Rabelais, juin 1986), texte repris dans De la Représentation, Paris, Seuil/ Gallimard, 1994, p. 267-281. 3 Sylvain Auroux, La Sémiotique… 4 Trésor de la langue française : Dictionnaire de la langue du XIX e et du XX e siècle, Paris, Klincksieck, puis CNRS, 1971-1994, 16 vol., s. v. "monument"
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  • HAL Id : halshs-01910460 , version 1

Citer

Jean-Luc Martine. Le monument ou le tombeau du sens : les idées de monument et de trace dans le discours des dictionnaires, de Richelet à l'Encyclopédie. Elseneur, 2008, Le Monument – la trace, 23. ⟨halshs-01910460⟩
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